samedi, octobre 14, 2006

En route

Les trois compagnons venaient de passer les portes de la Ville-Etat. Devant eux, les steppes semi-désertiques des vallées d'Antikon commençaient à apparaître. Seuls les environs de Manguo étaient verts. Après, l'eau manquait, détournée depuis longtemps au profit de la République.

Békomé, ravi, reniflait les odeurs désertiques. Il se sentait chez lui et allongeait le pas, son long coup tendu vers l'horizon orange. Ebaras, tranquille, se laissait bercer par son pas.
Animède, cheval des steppes lui aussi, cheminait les yeux baissés. Ses deux passagers, légers, ne le gênaient pas dans sa marche.
Il y avait dix minutes qu'ils avaient passé le pont. Qekiko ne pouvait se taire longtemps.

- "Ebaras?"
- "Oui?", marmonna un Ebaras ensommeillé.
- "Tu crois qu'on y arrivera?"
- "Mais oui, bien sûr..."

Le bien sûr était superflu. Tous savait qu'il voulait dire en réalité "peut-être", "on va essayer".
Qekiko avait accroché son arc au côté de la selle, et attrapé une flûte d'Efinor, un cadeau de son père avant son départ.
De ses flûtes qu'on disait taillées dans des os de spectres... Ce n'était que légende. Qekiko savait qu'elles étaient en os, certes. De mouton.

Les sons de la flûte n'en étaient pas moins enchanteurs et étranges. Venus d'un autre monde.
Les voyageurs et les animaux se trouvaient dans un état second, et cheminaient sans avoir conscience de la marche du temps.
Ce n'est qu'au crépuscule que Békomé, de lui-même, marqua le moment de la halte. Il se dirigea, d'un coup, vers un cercle de rochers abrités, qui offrait une bonne vue sur les chemins de croisée.
Ebaras, s'ébrouant, le flatta sur l'encolure.

- "Tu as bien fait, Békomé. C'est l'heure."

Et, glissant sur le chameau agenouillé, il atterrit doucement à terre.

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