Quête

Les compagnons d'Ebaras avaient passé toute la journée à visiter l'aire de Dièze, quartier où le Lexikon régnait sans conteste. Ils avaient déambulé partout, gaillards et le nez au vent. Ebaras, drapé dans sa cape de Maître-Mot, ornée de tous les alphabets du monde. Qekiko, fourrure lustrée. Tumanu, gracieuse et discrète.

Rentrés au Lexikon, ils étaient maintenant attablés devant une volaille grasse et rôtie à point.

Qekiko remarqua de nouveau à quel point Tumanu attirait, sans le savoir, tous les regards. Il se dit aussi que, s'il connaissait un peu Ebaras, et son étrange métier, il ne savait rien de Tumanu. Elle était déjà avec Ebaras quand ils s'étaient rencontrés. Ils allaient au même endroit. Il n'avait pas posé de questions.

- "Je suis Tumanu, la femme-flamme, qui vient du haut sommet. De la pointe extrême, où la nuit n'existe plus. Tellement la force des astres s'y est concentrée. Tellement le rôle de para-tonnerre qu'elle joue en permanence l'a gavée de feu et d'éclairs. "

Qekiko entendit les paroles résonner dans sa tête.

Tumanu ne parlait que peu. Comme tous ses semblables, l'énergie et l'esprit qu'elle véhiculait n'avaient pas besoin de mots pour s'exprimer...

Qekiko avait entendu parler de ces êtres de la Pointe Extrême. Là-haut, tout au sommet de la planète-pyramide.
De ces hommes et femmes minces et brûlants, qui avait emmaganisé une énergie astrale si forte, qu'ils étaient capables d'en lancer les traits mortels en cas de danger. De ceux dont le mode de communication avait été modifié par les radiations extrêmes de la Pointe, et qui pouvaient communiquer silencieusement par méta-transmission.


Dans l'auberge, les clients la regardaient avec des yeux de voleurs. De voleurs de feu.
Elle était pourtant vêtue de sombre, enveloppée dans une longue robe.
Pour Tumanu, qui éveillait à peu près tous les désirs masculins encore en état de naître, c'était une condition sine qua non.

Ebaras, remarquant comme Qekiko la tension qui commençait à régner autour d'eux, leur fit signe de monter au dortoir.Ils ne tenaient pas à avoir encore de la bagarre. Ni à faire découvrir trop tôt que la femme de feu avait vraiment le pouvoir de brûler.

Assise sur le châlit, Tumanu commença -mentalement- la conversation :

- "Et toi, Qekiko, que sais-tu faire?"

Le nez dans la fourrure de Qekiko, Tumanu était toute proche de lui, mais semblait complètement inconsciente de l'effet qu'elle produisait. Elle oubliait juste un instant que Qekiko n'était pas une peluche, mais un micro-humain des bases du sud.

- "Euh!" Qekiko rabattit ses oreilles rondes et chercha quelque chose qui puisse le valoriser. "Je sais parler!"

Tumanu rit doucement :

- "Ca, moi aussi! C'est juste que le plus souvent je n'en ai pas besoin.."

Qekiko chercha encore :

- "Je suis un chanceux!"

Tumanu redevint sérieuse :

- "Ca, c'est un vrai don! Et je ne pourrais pas dire que je l'ai... Tu resteras avec moi pour me le prêter de temps en temps?"

Si Qekiko n'avait pas eu de poils, il aurait rougi.

- "Pas de problème! Reste près de moi tant que tu veux!"

Pourtant, se disait-il, Tumanu n'est pas belle. Ni selon les critères des Mikeko, ni selon ceux des hommes des hautes faces.

- "Elle est juste rayonnante", se dit-il. "C'est le mot..."

Il alla se coucher, en prenant bien soin de ne pas se placer trop près de Tumanu.